Le 28 avril 2025, le président Donald J. Trump a signé un décret visant à renforcer l’application des exigences de maîtrise de l’anglais pour les conducteurs de véhicules commerciaux aux États-Unis. Bien que cette exigence existe depuis longtemps dans la réglementation fédérale (49 CFR 391.11(b)(2)), son application avait été assouplie en 2016 sous l’administration Obama, permettant à des conducteurs ne maîtrisant pas l’anglais de continuer à opérer malgré des infractions linguistiques.
À partir de quand cette mesure s’applique-t-elle ?
Le décret exécutif entre officiellement en vigueur le 25 juin 2025. À partir de cette date, tout conducteur circulant aux États-Unis devra être en mesure de lire et comprendre les panneaux de signalisation en anglais, communiquer verbalement avec les autorités, et comprendre les consignes écrites ou orales émises par les forces de l’ordre.
⚠️ Ce qui change concrètement
- À compter du 25 juin 2025, tout conducteur incapable de démontrer une maîtrise suffisante de l’anglais pourra être mis hors service immédiatement.
- Cette mesure s’applique à tous les conducteurs de véhicules commerciaux, incluant ceux provenant du Canada.
- Les autorités américaines, telles que les douaniers et les agents de la sécurité routière, seront habilitées à effectuer des contrôles aléatoires, sans qu’une infraction préalable ne soit nécessaire, si elles soupçonnent un manque de maîtrise de l’anglais.
Impacts pour les entreprises de camionnage du Québec
Les entreprises québécoises de camionnage, dont les chauffeurs sont souvent francophones, font face à une vulnérabilité accrue :
- Des interruptions soudaines de service en raison d’une mise hors service du chauffeur.
- Des retards de livraison pouvant entraîner des pénalités contractuelles ou des pertes de clients.
- Un risque accru de vol de cargaison, surtout si le camion est immobilisé dans une zone peu sécurisée.
- Des coûts logistiques importants pour rapatrier le chauffeur et faire appel à un remplaçant.
- Une atteinte à la réputation, tant auprès des clients que dans les réseaux industriels.
- Une mise à l’épreuve des permis d’exploitation si des incidents semblables se multiplient.
Intégration dans le plan de continuité des affaires (PCA)
Cette mesure réglementaire constitue un exemple clair de risque opérationnel d’origine réglementaire. Elle démontre l’importance d’intégrer les changements législatifs dans une approche de résilience organisationnelle. Un bon plan de continuité des affaires (PCA) ne se limite pas aux catastrophes naturelles ou aux cyberattaques — il doit aussi anticiper les nouvelles règles du jeu qui peuvent menacer la continuité des opérations. Voici quelques exemples :
🔒 Sécurisation de la cargaison et du véhicule
- Établir une procédure de sécurisation immédiate du véhicule si le chauffeur est retiré de la route.
- Identifier des partenaires américains pour l’entreposage temporaire sécurisé de la marchandise.
- Évaluer les risques liés à l’immobilisation prolongée d’un camion, en particulier la perte de la chaîne de froid ou la dégradation de certaines marchandises sensibles.
👥 Rapatriement et remplacement du conducteur
- Intégrer un protocole d’intervention rapide pour rapatrier le chauffeur mis hors service (ex. : vol d’avion, taxi longue distance, assistance transfrontalière).
- Maintenir une liste de chauffeurs de relève certifiés pouvant être dépêchés sur appel pour compléter les livraisons aux États-Unis.
- Prévoir une assistance psychologique ou juridique pour les chauffeurs se retrouvant seuls et vulnérables dans un autre pays.
📢 Communication et réputation
- Préparer des messages types pour informer rapidement les clients des retards, tout en rassurant quant à la gestion de la situation.
- Disposer d’un protocole de gestion des communications de crise, en cas de médiatisation d’un incident (notamment si une cargaison est bloquée, ou si des vidéos circulent sur les réseaux sociaux).
- Mettre à jour les engagements de service sur les plateformes B2B (ex. : Loadlink, Transcore) pour protéger votre indice de réputation.
🧾 Aspects légaux et permis
- Vérifier les conditions contractuelles des ententes de transport avec les clients américains : certaines clauses pourraient imposer des pénalités sévères en cas de retard, même si l’incident est dû à un décret gouvernemental.
- Anticiper les répercussions sur l’assurance commerciale, notamment en cas de réclamations pour pertes de revenus ou de dommages aux marchandises.
Recommandations concrètes pour les entreprises de camionnage
- Évaluer le niveau d’anglais de tous les chauffeurs transfrontaliers, en utilisant des outils de diagnostic simples.
- Offrir des formations ciblées pour renforcer la capacité à comprendre les panneaux de signalisation, les consignes orales, et les documents en anglais.
- Mettre à jour le plan de continuité des affaires pour intégrer ce scénario réglementaire.
- Créer un réseau de soutien logistique aux États-Unis, incluant chauffeurs de remplacement, entrepôts partenaires, firmes de sécurité.
- Informer les clients dès maintenant, non pas pour créer de l’inquiétude, mais pour démontrer votre proactivité et renforcer la confiance.
- Discuter avec les assureurs de l’étendue de la couverture en cas d’interruption liée à une mise hors service pour non-conformité linguistique.
En conclusion
Les frontières sont ouvertes, mais les règles changent. Ce décret américain démontre qu’un simple détail administratif ou linguistique peut mettre en péril une livraison, voire la chaîne d’approvisionnement d’un client stratégique. La maîtrise de l’anglais devient donc un enjeu de résilience opérationnelle, au même titre qu’un bris mécanique ou une panne informatique.
Les entreprises qui intégreront cette réalité dans leur plan de continuité seront mieux préparées… et moins surprises la prochaine fois.
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