De nos jours, il est essentiel que les entreprises, quelle que soit leur taille, soient bien préparées contre divers aléas pouvant nuire à la protection des données, tels que les cyberattaques ou les erreurs causées par des employés. Cependant, peu d’entre elles se doutent que leurs propres processus de gestion interne ainsi que leurs fournisseurs, aussi proches soient-ils, peuvent facilement devenir un vecteur de fuite d’informations sensibles.
Dans cet article, nous vous illustrons cette situation avec un scénario concret qui survient fréquemment en entreprise. À travers cet exemple, notre objectif est de mettre en lumière les risques réels liés aux relations avec les partenaires externes ainsi que les lacunes en matière de gestion contractuelle, tout en vous sensibilisant à l’importance d’une vigilance accrue vis-à-vis de ceux-ci.
Quand le recours à des travailleurs autonomes implique des intermédiaires
Afin de faciliter le processus d’embauche de travailleurs autonomes, plusieurs organisations ont recours à une agence de placement. En effet, certaines entreprises refusent de contracter directement avec un travailleur autonome. Elles préfèrent s’appuyer sur une agence de placement avec laquelle elles ont déjà établi une relation contractuelle globale.
Dans ce contexte, l’entreprise en question peut transmettre son propre contrat d’embauche à l’agence. Toutefois, cette dernière dispose généralement d’un contrat-cadre distinct, que son client, soit l’entreprise, n’a souvent jamais consulté. Le travailleur autonome doit alors signer ce contrat-cadre, auquel est annexé le contrat transmis par l’employeur.
Les clauses contractuelles à surveiller
Le problème survient lorsque le contrat-cadre de l’agence comporte des clauses différentes de celles prévues par l’entreprise. Par exemple, en le signant, le travailleur autonome doit parfois consentir à ce que toutes les informations liées aux projets sur lesquels il collabore soient partagées en tout temps avec l’agence de placement, à l’insu de l’employeur. La plupart du temps, le motif expliqué dans ces contrats-cadres tourne autour de la notion de « contrôle de qualité du travail du consultant » (et ce, même si personne dans l’agence de placement ne possède de compétence dans le travail effectué par le consultant), pour des suivis ponctuels sur les travaux exécutés ou encore, dans l’éventualité où l’agence de placement mettrait fin au contrat. Résultat : l’entreprise perd le contrôle sur des données confidentielles.
Les risques ne s’arrêtent pas là. Par exemple, si le siège social de l’agence de placement se trouve à l’étranger avec ses services technologiques, les informations peuvent alors être sauvegardées dans un centre de données situé hors du Canada, échappant ainsi à la législation canadienne. Même si le contrat entre l’agence de placement et le consultant stipule que les lois canadiennes s’appliquent, certaines clauses du contrat-cadre peuvent aussi préciser qu’une législation étrangère pourrait, dans certains cas, prévaloir sur une décision rendue au Canada.
Enfin, certaines clauses du contrat-cadre peuvent également exposer directement le travailleur autonome à des responsabilités personnelles. Cela le met à risque de sérieuses conséquences légales pour non-respect du contrat de l’agence de placement en cas de refus de transmission des dossiers sur lesquels ils travaillent.
Les limites des mesures de sécurité
Bien souvent, une entreprise qui engage un consultant externe exige que celui-ci signe un accord de confidentialité et suive des formations en sécurité de l’information, comme n’importe quel autre de ses employés. Pourtant, comme mentionné précédemment, le contrat-cadre signé avec l’agence de placement peut venir compromettre ces précautions et positionner le consultant entre l’arbre et l’écorce. De plus, cette situation crée un véritable angle mort dans la gestion des risques, souvent ignoré par l’entreprise.
Alors, comment gérer les risques efficacement ?
Plusieurs mesures peuvent être mises en place pour prévenir ce type de situation, tant pour l’entreprise que pour le travailleur autonome. Voici quelques exemples :
Pour l’entreprise
- Exiger tous les documents contractuels : obtenir une copie complète de tous les contrats, annexes et conditions générales auxquels le consultant sera soumis, incluant le contrat-cadre de l’agence.
- Contrôler les clauses sensibles : exercer un droit de regard sur les dispositions touchant la confidentialité, la propriété intellectuelle, la sous-traitance, la juridiction applicable et le transfert de données.
- Impliquer le service juridique : établir une marche à suivre claire avec le service juridique ou le conseiller juridique externe pour toute révision ou négociation de clauses contractuelles sensibles.
- Évaluer les risques de localisation des données : vérifier où les serveurs de l’agence ou de ses partenaires sont situés et si des transferts transfrontaliers sont possibles.
- Sensibiliser les gestionnaires : former les responsables d’embauche et les acheteurs à détecter les clauses à risque dans les contrats d’agences de placement.
- Intégrer la gestion contractuelle au cadre de gouvernance : inclure cette dimension dans la politique de sécurité de l’information.
- Tenir un registre des tiers critiques : documenter les agences, consultants et fournisseurs ayant accès à des informations sensibles, avec leur statut de conformité et les mesures de protection appliquées.
Pour le travailleur autonome
- Lire attentivement le contrat : examiner l’ensemble des clauses, y compris les annexes et les références croisées, avant toute signature.
- Consulter un conseiller juridique au besoin : faire valider le contrat ou des clauses précises par un avocat ou un notaire, surtout lorsqu’elles concernent la confidentialité, la responsabilité personnelle, la juridiction applicable ou le transfert de données à l’étranger.
- Comprendre ses responsabilités : connaître les obligations légales, fiscales et de confidentialité découlant du contrat ainsi que les obligations personnelles et comprendre les risques associés.
- Conserver les échanges et les versions signées : archiver les communications contractuelles, modifications et signatures électroniques pour référence future.
- Vérifier la portée du partage d’information : confirmer avec l’entreprise cliente ce qui peut ou non être communiqué à l’agence de placement.
- Protéger ses propres données et appareils : utiliser des comptes distincts, des solutions de chiffrement et des canaux sécurisés pour toute communication ou transfert de fichiers.
- Se doter d’une assurance responsabilité professionnelle : s’assurer que la couverture inclut les risques liés à la confidentialité et à la cybersécurité.
En conclusion
Les fuites de données ne sont pas toujours causées par des employés négligents ou des cybercriminels; elles peuvent également résulter de processus de gestion contractuelle défaillants. Heureusement, cette vulnérabilité est facilement évitable si l’entreprise met en place des mesures appropriées et adopte une gouvernance rigoureuse de ses contrats d’approvisionnement afin de mieux protéger ses informations stratégiques.
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Avis important
Cet article présente une perspective de gestion des risques organisationnels et n’a pas pour objet de formuler des recommandations juridiques. Les situations décrites peuvent varier selon le contexte contractuel, la juridiction applicable et les pratiques de chaque organisation.
Il est fortement recommandé de consulter un conseiller juridique ou un avocat spécialisé en droit des affaires ou en droit du travail avant de conclure, modifier ou interpréter un contrat avec une agence de placement ou un consultant externe.


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